Le grenier à docs du cachalot #12 - Franck Ferrand raconte la mission Apollo 11 (sur Radio Classique)

Aujourd'hui, je vous propose de vous partager une émission de radio parce que ça faisait longtemps. 

Et ça tombe bien, il y a quelques coquilles dedans à rectifier et des anecdotes intéressantes à partager autour 😉. 

Neil Armstrong (1930-2012) au bas de l'échelle du LM. Quelques instants plus tard, il effectuera le premier pas de l'Homme sur la Lune. 

Un événement radiophonique qui avait fait beaucoup de bruit en 2018 fut l'éviction de Franck Ferrand d'Europe 1 après sept ans de présentation de l'émission très populaire Au Cœur de l'Histoire. A l'époque, cela avait provoqué une montée au créneau de nombre d'auditeurs et il y avait même eu des pétitions pour que l'émission soit maintenue par la nouvelle direction d'Europe 1 (j'en avais d'ailleurs signé une). Finalement, Franck Ferrand partit vers de nouveaux horizons et s'installa à la rentrée suivante sur Radio Classique pour animer une émission de récits historiques. 

Avec le recul, ce fut une très bonne chose puisque c'est une excellente émission qui dure depuis maintenant presque trois ans déjà, un régal à écouter.

Tous les sujets ne m'intéressent pas, bien sûr. Il y a des sujets avec lesquels j'ai plus d'affinités que d'autres. Mais, pour ma part, je télécharge le podcast quand le sujet retient mon attention et je le mets dans une playlist privée que j'ai sur Deezer. 

Parmi les sujets qui m'intéressent, je ne pouvais bien évidemment pas faire l'impasse sur un récit que Franck Ferrand consacra en octobre 2018 à la mission Apollo 11, en marge de la sortie du très bon film de Damien Chazelle First Man. Et c'est de celui-ci justement dont on va parler aujourd'hui. 


Sans plus attendre, je vous laisse ci-dessous le récit de Franck Ferrand 😉 :

 
J'espère que cela vous intéressera. 

Maintenant, nous allons développer sur les petites coquilles du récit et nous permettre de parler ainsi d'anecdotes sur le programme Apollo. Pour faire simple, je vais me contenter de reprendre ce que dit Franck Ferrand et de contredire ou rajouter une information. 

Je vais reprendre les éléments au fur et à mesure qu'ils arrivent dans le récit. 

"L'exploit de juillet 1969, lorsqu'on a marché sur la Lune". 

Alors oui mais non, puisque l'on a marché PLUSIEURS fois sur la Lune. Même si les cinq autres fois ont été globalement oubliées, hélas, des mémoires. Au sens strict, l'exploit de juillet 1969 n'est "que" celui où l'on a marché pour la première fois sur la Lune. 

Mais les autres missions ne furent pas moins un exploit, il faut le rappeler. Chaque mission lunaire aura eu des objectifs plus élevés que la précédente, jusqu'à l'apothéose avec Apollo 17 en décembre 1972 qui, bien n'ayant pas marqué le grand public, fut la mission sur la Lune la plus fructueuse et la plus réussie. 

Donc en qualité de puriste historique de l'histoire spatiale, on pourrait tout aussi bien parler de l'exploit de novembre 1969 (Apollo 12) ou de celui d'avril 1972 (Apollo 16). 

Rappelons donc TOUTES les missions humaines sur la Lune :
  1. APOLLO 11 (juillet 1969)
  2. APOLLO 12 (novembre 1969)
  3. APOLLO 14 (janvier-février 1971)
  4. APOLLO 15 (juillet-août 1971)
  5. APOLLO 16 (avril 1972)
  6. APOLLO 17 (décembre 1972)
Evidemment il manque Apollo 13 puisque les astronautes ne purent malheureusement pas se poser sur la Lune en raison de l'accident. Mais ce fut aussi un exploit de les ramener vivants sur la Terre. 

Apollo 11 est certes le premier atterrissage sur la Lune mais n'est qu'un exploit parmi les autres exploits du programme Apollo. Même si ce n'est pas ce que la mémoire collective en a retenu et continuera probablement d'en retenir. 

En terme de sens de la phrase, il serait donc plus correct de parler de "l'exploit de juillet 1969, lorsqu'on a marché pour la première fois sur la Lune", histoire de ne pas mettre Apollo 11 au-dessus du reste car ce n'est pas très juste sur le plan de la réalité historique. 

Mais, en dehors des amateurs d'histoire spatiale, c'est ce que tout le monde pense donc je n'en veux pas à Franck Ferrand de l'avoir dit comme ça.


"Cyrano de Bergerac l'avait imaginé [...]".

Et il fut loin d'être le seul, ni même le premier. En fait, le premier texte relatant un voyage sur la Lune date du IIe siècle après Jésus-Christ et est l'œuvre d'un auteur nommé Lucien de Samosate. Donc l'Homme rêvait d'aller sur la Lune bien avant le XVIIe siècle. 

Et comme la Lune était évidemment connue déjà des premiers Hommes, on peut imaginer que le rêve, sans qu'il laisse alors de traces écrites, a dû traverser l'esprit de certaines personnes longtemps avant l'Antiquité.

"Oui, ça casse un peu le rêve mais il faut le dire, la conquête lunaire est le résultat direct de cette course à l'espace, de cette course acharnée - pour ne pas dire sordide - entre Américains et Soviétiques".

Et c'est bien tout le problème et la raison pour laquelle on a autant de mal à trouver une trajectoire digne de ce nom pour le vol habité depuis 1972. Mais nous aurons l'occasion d'en parler plus loin. 

"A l'époque, [le Spoutnik 1] c'était complètement extraordinaire".

Oui et ce d'autant plus que de nombreux pays occidentaux le prennent alors comme un Pearl Harbor technologique. Et si ça paraissait extraordinaire à une bonne partie de la population, les autorités ne pouvaient y voir autre chose qu'une certaine crainte car le Spoutnik témoigne surtout de l'avancée et de la maitrise de l'URSS dans le domaine des missiles à longues portées. S'ils peuvent placer en orbite un petit satellite artificiel, il n'y a désormais plus aucun doute sur le fait que l'Union Soviétique soit capable d'envoyer sur les Etats-Unis une bombe atomique. Et là, ça ne rigole clairement plus. L'Amérique doit donc se lancer à son tour dans la voie spatiale si elle veut maintenir l'équilibre de la Guerre Froide et son image idéologique dans le monde. 


"Dès février 1962, les Américains font faire à John Glenn (1921-2016), leur premier astronaute, trois révolutions terrestres".

Alors non puisque Glenn n'était pas le premier astronaute étasunien. En effet, avant même le discours de Kennedy, Alan Shepard (1923-1998) sera le premier Américain dans l'espace. Et il sera suivi par Virgil "Gus" Grissom (1926-1967) en juillet de cette même année 1961. 

Glenn est quant à lui le premier Américain à avoir été mis en orbite autour de la Terre. Ce qui n'est pas rien, déjà. 

Notons que Shepard commandera Apollo 14 (dont j'ai parlé ici récemment) et sera le cinquième Homme à marcher sur la Lune.

Glenn revolera dans l'espace seulement en 1998 durant une mission navette et détient toujours à l'heure actuelle le record du plus vieil homme ayant effectué un vol spatial puisqu'il avait alors 77 ans.

"A la fin de 1965, ils parviennent à faire voler deux cabines Gemini à moins d'un mètre de distance".

Et ce fut une mission presque improvisée puisque, au départ, une seule mission Gemini devait partir pour ce vol, avec l'étage Agena. Mais l'étage Agena en question a explosé lors de son lancement, ce qui a conduit à reporter l'envoi des deux astronautes. 

Finalement, on décida de ne pas annuler le vol mais de faire de Gemini 6 et Gemini 7 une sorte de vol conjoint afin de s'entrainer à retrouver facilement l'étage Agena autour de la Terre par la suite. Comme le dit Franck Ferrand, les deux vaisseaux voleront jusqu'à un mètre seulement de distance l'un de l'autre, au point que les astronautes s'aperçoivent distinctement les uns les autres depuis les deux vaisseaux. 

L'amarrage à l'étage Agena pour les assemblages en orbite sera réussi effectivement en 1966 par Gemini 8 avec Neil Armstrong (1930-2012) et David Scott. Tous deux marcheront plus tard sur la Lune. 

Mais n'oublions pas qu'un grand succès soviétique eut encore lieu en mars 1965 lorsque le cosmonaute Alexei Leonov réalise la première sortie dans l'espace.


"Il est vrai qu'à la même époque, les Soviétiques ont mis Luna 10 en orbite autour de cette Lune tant convoitée".

Oui, et avant il y avait eu aussi Luna 9 qui réalisa le premier atterrissage en douceur sur la Lune. Avant les Surveyor américaines.  

Concernant ensuite la sonde Zond 5, elle fut même à l'origine de l'objectif lunaire d'Apollo 8, car les Américains, en constatant le succès de l'aller-retour automatique soviétique, craignaient qu'ils ne les battent avec des cosmonautes la fois suivante. Cela a donc contrainte la NASA à changer le plan pour Apollo 8, ce qui fut facilité par le fait que le module lunaire n'était pas encore prêt. 

Les trois astronautes d'Apollo 8 seront en décembre 1968 les premiers Hommes à quitter l'orbite basse terrestre et à tourner autour de la Lune.

"Certains ont pensé qu'on pourrait envoyer des réservoirs sur la Lune, ce qui permettrait aux astronautes de faire le plein avant de repartir".

Pour la Lune, ça n'était pas utile puisque la Lune est suffisamment proche pour que l'on ait pas besoin d'y aller avec du matériel trop lourd, surtout pour des missions courtes comme celles du programme Apollo. On part avec tout ce dont on a besoin pour faire tout le voyage. 

Par contre, pour Mars, là, cette solution est incontournable puisque la masse et le temps du trajet seront bien plus grandes que pour la Lune. 

La solution fut apportée par Robert Zubrin au début des années 1990 et consiste tout simplement à fabriquer directement sur la planète rouge l'air dont les astronautes auront besoin pour respirer et le carburant pour le voyage retour.  


"Je me prends un peu pour Michel Chevalet quand je vous raconte ça".

Tant qu'à faire, je ne résiste pas à placer une petite image de monsieur Chevalet au milieu des ruines du programme lunaire soviétique 😄 : 


"Et puis, il y a une troisième solution encore plus maline, c'est ce qu'on appelle le rendez-vous en orbite lunaire [...]".

Solution tellement pratique et économique qu'elle fut également retenue pour les missions lunaires habitées soviétiques. Avec une particularité en plus, c'est que contrairement à Apollo, il n'y avait pas de tunnel entre les deux vaisseaux russes. De ce fait, le cosmonaute qui devait descendre se poser sur la Lune devait d'abord faire en orbite autour de la Lune une sortie dans l'espace pour rejoindre son module lunaire et refaire la même chose en revenant de la surface. 

C'aurait été extrêmement dangereux mais l'image aurait sans doute été très spectaculaire ! 

Aurait car malheureusement le programme lunaire soviétique échouera et sera abandonné au milieu des années 1970. 

"La mission Apollo 7 tourne à la tragédie [...]".

Alors non, c'était Apollo 1 et non pas Apollo 7. 

Mais ce sont bien les astronautes Grissom, White et Chaffee qui furent hélas tués dans l'incendie au sol de leur capsule durant un entrainement. 

Comme mentionné précédemment, Grissom fut en juillet 1961 le deuxième Américain dans l'espace. White, quant à lui, fut en juin 1965 le premier Américain à effectuer une sortie extravéhiculaire. Chaffee était un bleu qui avait été CAPCOM durant les missions Gemini. 

Les objectifs de la mission Apollo 1 seront remplis en octobre 1968 par Apollo 7, c'est sans doute de là que vient la petite confusion de Franck Ferrand.


"On se dit qu'Apollo 11 devrait être la bonne tentative".

Oui et il faut voir l'enchainement rapide avec lequel se déroule ces missions : 
  • APOLLO 7 en octobre 1968 (test du module de commande en orbite terrestre)
  • APOLLO 8 en décembre 1968 (test du module de commande en orbite lunaire)
  • APOLLO 9 en mars 1969 (test du module lunaire en orbite terrestre)
  • APOLLO 10 en mai 1969 (test du module lunaire en orbite terrestre et descente jusqu'à 14 km de la surface de l'astre)
  • APOLLO 11 en juillet 1969 (premier atterrissage sur la Lune)
Cependant, les officiels et les services de renseignements américains gardaient un œil sur l'évolution du programme soviétique. Ils n'eurent définitivement la certitude qu'Apollo 11 serait probablement la première sur la Lune que quelques jours avant le lancement lorsque de photographies de satellites espions révélèrent l'explosion de la fusée lunaire soviétique. 

"Il leur annonce que dans le cas où la mission devrait, pour une raison ou pour une autre, être interrompue, tous les trois, les mêmes astronautes, seraient retenus pour la prochaine tentative".

Alors ça, je ne sais pas trop d'où ça sort puisque je n'en ai jamais entendu parler en dehors de ce récit de Franck Ferrand. 

Je ne suis pas sûr qu'on aurait pris le risque de promettre ça aux astronautes, d'autant plus qu'il ne faut pas oublier qu'à ce moment-là tout est quasiment prêt déjà pour Apollo 12, qui doit se poser sur la Lune quatre mois après Apollo 11. En cas d'échec non mortel d'Apollo 11, c'aurait plus probablement été tout simplement à Apollo 12 de faire le premier atterrissage lunaire. 

Et surtout que le matériel était limité puisque la chaine de production des Saturn V était déjà arrêtée et que la NASA commençait déjà à avoir des coupes budgétaires. On aurait pas pris le risque de décaler le programme scientifique, je pense. 
 
"Vous imaginez la frustration de Collins [...]".

Il avait aussi surtout comme crainte d'être celui qui a le plus de chances de survivre. Si Neil Armstrong et Buzz Aldrin ne pouvaient pas repartir de la surface lunaire, Collins reviendrait sur Terre quand même et serait alors le seul survivant de l'équipage. Il lui aurait fallu vivre ensuite toute sa vie avec ce poids inouï sur les épaules.

Notons que, comme ses deux camarades d'Apollo 11 d'ailleurs, Collins était un astronaute expérimenté (il avait déjà volé en 1966 sur Gemini 10 avec John Young) et qu'il aurait facilement pu prétendre commander ensuite une autre mission pour se poser lui aussi sur la Lune (il aurait sans doute été mis en réserve pour Apollo 14 ce qu'il l'aurait placé comme commandant potentiel pour Apollo 17). Mais il déclina l'offre, préférant se consacrer à autre chose, à sa vie familiale notamment, et à laisser sa place après avoir participé à une mission historique. C'est tout à son honneur.


"Et pendant deux heures et demi, les deux hommes vont procéder à toutes sortes d'expériences scientifiques".

Oui mais assez peu parce que le temps est extrêmement limité pour cette sortie historique. Ils vont mettre un sismomètre, déplier une petite voile pour recueillir des particules solaires et déposer un réflecteur laser.

Ils ne s'éloignent pas à plus d'une cinquantaine de mètres du module lunaire mais collectèrent 21 kg de roches lunaires, ce qui n'est pas mal du tout pour un début. 

Mais c'est moins que ce qu'ils se sont entrainés à faire parce qu'avec le coup de téléphone du président Nixon et le cérémonial, ils n'ont pas eu assez de temps. 

"On plante le drapeau américain".

Et non sans mal. En effet, le drapeau n'a été ajouté qu'un mois à peine avant le lancement et les deux astronautes n'ont pas été entrainés à le déplier. Ils ont fait le maximum de ce qu'ils pouvaient en improvisant (ce qui explique sans doute le silence des astronautes à cet instant de la sortie). Ils arriveront à le planter en forçant un peu parce que le sol sous la poussière est très dur et n'oseront plus y toucher de peur de le faire tomber en direct ! 

Notons que les drapeaux seront ensuite une tradition durant les missions Apollo sur la Lune et que les astronautes recevront un entrainement là-dessus pour s'aider à manipuler ce symbole. 

Ce qui n'empêchera pas les deux astronautes d'Apollo 12 de casser littéralement le drapeau ^^ ! 


"Le programme Apollo va durer jusqu'en 1972 et permettre à une douzaine d'hommes d'aller fouler le sol lunaire".

Et histoire de rendre leur place légitime dans l'Histoire à tous, j'ai même fait un article complet là-dessus, monsieur Ferrand 😉 : Liste des astronautes lunaires du XXe siècle

"Disons-le, petit à petit, ce sont des images qui se banalisent. Ce qu'on voulait voir c'était le premier pas d'un Homme sur la Lune, la suite est moins amusante [...]"

Hélas, c'est complètement vrai. Du moins pour le grand public puisque bien évidemment les passionnés sont restés fidèles au poste pour suivre la plus extraordinaire aventure humaine de l'Histoire de l'Humanité jusqu'au retour d'Apollo 17. 

Mais la blasitude générale des gens "normaux" est arrivée à une très grande vitesse. Apollo 12 n'intéresse déjà plus grand-monde et Apollo 13 est lancée dans l'indifférence générale alors qu'il ne s'est écoulé que quelques mois à peine depuis Apollo 11. 

Les dernières missions que sont Apollo 14, Apollo 15, Apollo 16 et Apollo 17, pourtant bien plus aventureuses, bien plus longues et bien plus spectaculaires ne suffiront pas à faire revenir le grand public américain. 

Cela explique aussi en partie les malheureuses annulations qui ont frappé le programme Apollo dès 1970, obligeant la NASA à devoir se résoudre à annuler hélas les missions Apollo 18, Apollo 19 et Apollo 20 (comme je l'ai développé ici). 

La magie et la prouesse de l'Homme marchant sur la Lune ont été complètement zappées par le triomphe politique américain. Pour les décideurs comme pour le grand public, la course était juste gagnée, il n'y avait pas de raison de continuer... Triste et stupide façon de penser. 

C'est comme si l'exploration de l'Amérique s'était arrêtée au premier voyage de Christophe Colomb parce que la reine Isabelle avait été blasée de ce qui lui avait été rapporté du Nouveau Monde !    

"Un certain désenchantement va faire suite à l'enthousiasme universel [...]"

Oui, pour les raisons évoquées précédemment en ce qui concerne la "masse".  

En ce qui concerne l'enthousiasme universel, il ne faut pas se faire d'illusion non plus : beaucoup de gens à l'époque trouvaient que c'était de l'argent fichu en l'air et que la science ne méritait pas que l'on se donne autant d'efforts. Le programme Apollo était contesté par beaucoup de monde. 

"Le mode rendez-vous en orbite lunaire a condamné le programme Apollo à une forme de ronronnement".

Alors non. Le mode de fonctionnement des missions n'a pas joué. C'est un problème beaucoup plus large et beaucoup plus ancré qui a fait que la blasitude est si vite arrivée chez les gens. 

Les gens s'en fichaient de la science, ils ne voyaient que l'exploit politique. Une fois qu'on l'a fait, ça n'intéressait plus les gens. Avec ou sans rendez-vous en orbite lunaire, le grand public serait parti. C'est triste à dire mais c'est vrai. 

Et c'est bien le problème qui va repointer le bout de son nez pour les missions Artémis et plus tard pour Mars. 

Une fois qu'on aura fait le voyage martien une première fois, les gens s'en détourneront. 

"Avec la fin de la Guerre Froide, tout ça s'est beaucoup amenuisé et jamais plus on a retrouvé cette magie de juillet 1969".

A proprement parler, ça ne s'est pas amenuisé. La conquête spatiale a juste changé de forme, elle a évolué vers autre chose. 

Cela passe aussi par les changements d'ambitions politiques. Aujourd'hui, aucun pays n'est prêt à investir de façon aussi énorme dans un programme spatial que ce qui a été fait pour Apollo. 

On a jamais retrouvé cette magie de 1969, ça, cela dépend du point de vue que l'on adopte. Si l'on veut parler du spectaculaire et de l'humain pour la magie de l'espace, oui, on a jamais fait mieux... pour la simple et bonne raison que l'on ne s'est jamais donné les moyens de faire mieux. 

En revanche, les odyssées des sondes automatiques qui ont montré les paysages de Vénus, Mars, Jupiter ou encore Pluton, ça c'est de la magie à l'état pur, c'est la beauté de l'exploration à son paroxysme 😀 ! 

Et je ne vous parle même pas des sondes Voyager qui se trouvent aujourd'hui dans le milieu interstellaire... Si ça ne vend pas du rêve, je ne sais pas ce qu'il vous faut ^^ ! 

"Certains sont devenus des spécialistes, des fétichistes d'Apollo 11 [...]".

Bon, ben, je crois qu'on parle de moi ^^ ! 

"D'autres personnes se sont mises à ironiser sur le thème "ben on est allés sur la Lune et qu'est-ce que ça nous a apporté ? Rien du tout.".

Moi aussi, je ne suis pas d'accord avec ça. C'est une remarque de personnes stupides et/ou mortes à l'intérieur. 

Au-delà évidemment de ce que dit Franck Ferrand sur le génie humain exalté par LES missions Apollo, celles-ci nous ont montré également beaucoup d'informations sur la naissance et l'Histoire de la Lune, de la Terre et du Système solaire. 

Sans compter que cela eut énormément de retombées technologiques sans lesquelles notre mode de vie actuel n'existerait tout simplement pas. 

Bref, Apollo fut une ouverture à la découverte de notre passé et de nos origines. Et c'est ça la plus belle chose à retenir de l'aventure Apollo : l'Homme qui part chercher des réponses aux questions qu'il se pose lui-même sur sa nature, poursuivant encore une fois contre vents et marées un voyage sans fin qui dure depuis qu'il y a des Hommes et qui durera encore tant qu'il y aura des Hommes. 

Je crois que le meilleur mot de la fin revient à David Scott, le commandant d'Apollo 15 : 



N'hésitez pas à me dire en commentaire ce que vous avez pensé de cet récit et des anecdotes que j'ai pu mettre 😉 ! 


PS : bien évidemment, tout ce que j'ai dit ici est seulement une humble correction de petites erreurs historiques. Ce n'est pas une attaque contre Franck Ferrand ou quoi que ce soit de malveillant du genre. Franck Ferrand s'attire bien des foudres en ce moment et je ne vais certainement pas m'ajouter à la masse de braillards qui trouvent là une occasion pour déverser leur bile sur de la politique, une vision de l'Histoire ou autres choses. 

Rappelons une chose évidente au passage, à savoir que chacun est libre d'avoir les idées politiques qu'il veut, ce n'est pas parce que quelqu'un pense différemment de toi sur certains sujets qu'il faut le faire taire. Que Franck Ferrand puisse avoir des opinions de droite ne me pose donc pas de problème, ce n'est pas à moi de juger. 

Tant que ça ne change rien à la qualité de son travail, je ne vois pas où est le problème.  

Commentaires

  1. Mais pourquoi les américains n'avaient-ils rien prévus après la Lune pour continuer ?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Eh bien, il y avait des choses prévues. Au départ. Mais elles émanaient des scientifiques et des ingénieurs, pas des politiques.

      Pour les ingénieurs de la NASA, les missions Apollo n'étaient pensées que comme un début et pas une fin en soi. Après les missions d'exploration jusqu'à Apollo 20 et le projet Skylab, les améliorations apportées à la Saturn V devaient amener à la Saturn VIII, capable d'envoyer de grosses masses sur la Lune. L'idée, déjà à l'époque, était de pouvoir mettre plus de matériel pour des séjours plus longs et établir une petite base lunaire.

      Dans le même temps, la NASA aurait voulu faire une mission habitée du coté de Vénus en envoyant un vaisseau sur le modèle de Skylab : la mission et ses trois astronautes seraient partis début 1973, un survol à 4500 km de la surface vénusienne aurait eu lieu vers octobre de cette même année et le retour serait arrivé à la mi-1974.

      Avec ce projet vénusien pour 1973-74 et la base lunaire opérationnelle à la fin des années 70, la NASA pensait pouvoir envoyer les premiers astronautes sur Mars à l'horizon 1986.

      Vu la durée des missions martiennes, je me dis que si c'était arrivé il y aurait peut-être encore eu une mission là-bas l'année de ma naissance, 1993 ^^ !

      Mais étant donné le manque de connaissances qu'on avait à l'époque d'Apollo des effets d'un séjour prolongé dans l'espace sur le corps humain, les développements et recherches à faire auraient été telles qu'il est peu probable que ces dates-là auraient pu être respectées.

      Et il a manqué l'argent, ce qui a réglé la question.

      Tout ça, c'était la vision de Von Braun et de ses ingénieurs.

      Mais pour les politiques et les gens "normaux" il n'était pas question d'aller plus loin qu'Apollo parce qu'ils n'en voyaient pas du tout l'intérêt. Le programme AAP qui devait suivre les missions Apollo a été désapprouvé par Nixon dès 1969 et tout le monde dès le début parce que ça coutait trop cher pour "rien" (selon eux).

      Comme je le disais dans mon article, même Apollo les gens s'en fichent après Apollo 11. Une fois qu'on l'a fait et qu'on a battu les Russes, ça n'avait plus aucun intérêt politique et les budgets ont commencé à être réduits.

      Et manque de chance, l'accident d'Apollo 13 a participé à devoir encore annuler les deux dernières missions qui étaient prévues à ce moment-là, Apollo 18 et 19, qui auraient pourtant été des missions encore plus longues et encore plus intéressantes qu'Apollo 14, 15, 16 et 17.

      Si tout s'était passé comme prévu, la liste des Hommes ayant marché sur la Lune aurait donné ça :

      1. Neil Armstrong (Apollo 11)
      2. Buzz Aldrin (Apollo 11)
      3. Charles Conrad (Apollo 12)
      4. Alan Bean (Apollo 12)
      5. Alan Shepard (Apollo 14)
      6. Edgar Mitchell (Apollo 14)
      7. David Scott (Apollo 15)
      8. James Irwin (Apollo 15)
      9. John Young (Apollo 16)
      10. Charles Duke (Apollo 16)
      11. Eugene Cernan (Apollo 17)
      12. Joe Engle (Apollo 17)
      13. Richard Gordon (Apollo 18)
      14. Harrison Schmitt (Apollo 18)
      15. Fred Haise (Apollo 19)
      16. Gerald Carr (Apollo 19)

      Mais les gens ne voient pas la science, ils ne voient que le coté "sport" de la conquête.

      Supprimer
    2. (2/3)

      Et quand je dis que personne n'a essayé de se donner les moyens de faire mieux, c'est parce que tout simplement la question financière a toujours rebuté les politiques et les citoyens.

      Les navettes spatiales sont nées de ça puisque étant réutilisables elles étaient censées faire tomber les prix de l'accès à l'espace. En fait, ce n'est pas ce qui va se passer et les navettes tueront même quatorze personnes malheureusement.

      Quand le président George Bush père lance le SEI en 1989 et demande à la NASA de plancher déjà il y a trente ans sur le retour sur la Lune et la mission vers Mars, l'estimation de coûts abouti à un chiffre de 450 milliards de dollars. Autant dire que le projet n'a même pas été lu jusqu'au bout par les congressmen.

      Idem en ce qui concerne le contexte. Pour mettre autant de moyens, il faut que les Etats-Unis qui sont leader se sentent menacés. Or, jusqu'à récemment ce n'était pas du tout le cas et c'est bien pour ça que le nécessaire retour vers la Lune a été jugé sans intérêt pendant 45 ans.

      Par chance, aujourd'hui le contexte est bien plus favorable à Artémis que ce n'était le cas il y a dix ans pour Constellation. L'ISS est maintenant terminée, la Chine et la Russie se lancent sur la route de la Lune et la NASA doit trouver un nouveau projet pour rester leader parce que le "on l'a déjà fait" n'est plus d'actualité.

      Les USA doivent aller vers Mars s'ils veulent rester la puissance dominante mais comme Mars est inatteignable pour les astronautes à l'heure actuelle, il faut remettre l'étape lunaire pour se préparer au grand saut vers la planète rouge. En plus, cela permettra de faire l'exploration poussée qu'on avait pas pu faire à l'époque d'Apollo donc c'est tout bénef :) !

      Donc on prévoit tout le temps des projets intéressants et les ambitions ne s'amenuisent pas. C'est la volonté politique qui, elle, ne suit pas et se contente de faire ce qui l'arrange et d'arrêter tout quand on a gagné.

      Là on repart dans une très bonne direction, une sorte de super-Apollo qui va arriver sur la Lune et conduire à terme sur Mars. Pour l'instant, la NASA dit qu'elle sera de retour sur la Lune en 2024 et arrivera sur Mars en 2033 mais peu probable que ces dates restent comme ça, ça va probablement glisser de quelques temps, surtout dans le cas de Mars.

      Mais les politiques étant ce qu'ils sont, les successeurs de Franck Ferrand auront dans quarante ans la même impression que celle de Franck Ferrand que tout cela s'est amenuisé avec la fin de la Guerre Froide. Une fois que l'on l'aura fait une fois, les gens se désintéresseront des voyages martiens, prétextant que c'est inutile et que ça coûte trop cher.

      Supprimer
    3. (3/3)

      Avec une différence tout de même par rapport à Apollo, c'est que là ce seront des missions longues. Donc avec des astronautes qui passeront un an sur Mars et les tonnes d'échantillons qui reviendront sur Terre, si on part juste sur une estimation réaliste voulant que le programme martien aura autant de missions sur la planète rouge qu'en avait eu Apollo sur la Lune, ça fera six ans de présence sur Mars et énormément de données à exploiter sur Terre ensuite. Autant dire qu'il se passera après longtemps avant que des scientifiques se plaignent de n'avoir plus assez de travail ;) !

      C'est aussi pour ça que les scientifiques ont mis si longtemps à redemander à aller sur la Lune, parce qu'il a fallu longtemps pour éplucher ce qui avait été rapporté par Apollo. Et qu'il y avait aussi bien d'autres sujets d'études pour l'exploration spatiale, il n'y a pas que la Lune.

      En bref, tout n'est qu'une question de contexte politique et de motivation.

      Quand le contexte est bon, ça donne Apollo et Artémis.
      Quand le contexte est naze, ça donne des annulations de l'AAP, du SEI et de Constellation.

      Tout simplement.

      En fait, la conquête habitée de l'espace se produit par vagues. Après le spectaculaire on revient à quelque chose de plus "simple" en attendant que le contexte soit meilleur. C'est ce qu'il s'est passé après Apollo jusqu'à aujourd'hui où la Lune redevient une étape incontournable qui inaugurera dans quelques années la plus grande exploration de l'Histoire de l'Humanité.

      Si on regarde un peu les choses, on peut se dire déjà qu'avec la trajectoire actuelle cette phase de renouveau d'exploration durera du prochain vol circumlunaire (Artémis 2 prévu dans deux ans et demi) jusqu'à la dernière mission humaine américaine sur Mars.

      Et ce sera nuancé aussi cette fois par le fait qu'il y a de nouveaux acteurs qui vont chacun à son rythme.

      Pour la Lune, quand le programme Artémis sera fini et que les Américains se lanceront vers Mars, il restera toujours les missions russes et chinoises qui continueront d'explorer le satellite pendant ce temps-là jusqu'à maitriser à leur tour les techniques pour s'élancer vers Mars. Et il y aura aussi les Indiens un peu plus tard qui feront pareil.

      Sans compter qu'il y aura les partenariats internationaux qui permettront, espérons-le, à la France de participer à un peu tout ;) !

      Pour contredire Franck Ferrand, si j'ose dire, on peut déjà considérer que l'âge d'or de l'histoire spatiale n'est pas derrière nous, il est devant. Et ça, ça donne une bonne hype pour l'avenir.

      Même si on sait déjà que les erreurs du passé qui ont donné l'impression de Franck Ferrand que je commente se reproduiront une fois Mars atteinte dans vingt ans.

      Supprimer

Enregistrer un commentaire

Posts les plus consultés de ce blog

Ils auraient dû marcher sur la Lune...

Les prochains marcheurs lunaires !

Liste des astronautes lunaires du XXe siècle